Les jours de mon abandon

Elena Ferrante, la géniale auteure de la quadrilogie dont tout le monde (dont moi !) attend impatiemment la sortie du dernier tome (voir billets sur L’amie prodigieuse, Un nouveau nom, Celle qui fuit et celle qui reste) a écrit d’autres romans. Les jours de mon abandon est une chronique d’une justesse impitoyable racontée à la première personne par la narratrice, Olga, 38 ans, quittée sans préavis après 15 ans de vie commune par son mari Mario pour une jeunette de 20 ans. Se retrouvant brutalement seule avec ses deux jeunes enfants et le chien-loup de son mari, sans travail, peu à peu elle perd pied… L’auteur décrit comme au scalpel, de manière crue et presque violente l’abattement, la déchirure, la perte de sens et de repères et la folie qui rôde… On assiste en particulier à une journée terrible où tout semble se liguer contre elle : les clés qui ne veulent brusquement plus ouvrir la porte, le chien qui a été empoisonné, le fils dont la fièvre ne veut pas tomber, et le fantôme d’une femme abandonnée par son mari alors qu’elle même était petite et dont le destin l’avait marquée… Pied à pied, il lui faudra mener un rude combat pour retrouver le lien avec le réel et la vie : « Le futur – pensais-je – sera tout entier ainsi, la vie vive mêlée à l’odeur humide de la terre des morts, l’attention confondue avec l’inattention, les élans enthousiastes du coeur enchevêtrés aux brusques chutes de la signification. Et il ne sera pas pour autant pire que le passé. »

Excellent ! Mais à ne pas lire en cas de période de rupture fraîche !

« Le balcon s’avançait dans le vide comme le tremplin d’une piscine. »

« Si j’avais trouvé aimables tous les signes que j’avais autrefois assimilés à son contact, comment pouvais-je, en quelque sorte, les éliminer définitivement de mon corps, de mon esprit, sans devoir découvrir que, de cette façon, c’était moi-même que j’éliminais ? »

Un extrait de critique trouvé sur Babelio, que je trouve très juste et très bien exprimé : « Le monde d’Olga se fissure comme sa raison: les serrures se rebellent, les fourmis grouillent, les enfants vomissent, les chiens s’empoisonnent, les téléphones se cassent, les amis fuient..
Les comparaisons, les images elles aussi décrochent, et on sent la langue, comme la narratrice, gagnée progressivement par une déréliction inquiétante, dangereuse.
Les objets sont eux aussi détournés de leur fonction: une pince à linge sur un bras, un coupe-papier dans un genou servent -follement- à tenter de reprendre pied dans la réalité, un marteau à appeler au secours, un permis de conduire à assouvir sa frustration sexuelle… »

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9 commentaires pour Les jours de mon abandon

  1. keisha41 dit :

    Un jour peut être la lirai-je… Entendu à la radio des passages des deux premiers tomes de l’histoire des deux amies, est-ce le côté ‘auditif’? je n’ai pas eu envie de voir plus. On en a trop parlé, je laisse le temps.

  2. Mind The Gap dit :

    Une jeunette de 38 ans ???
    Moi aussi j’attends comme le messie le tome 4, mais on n’a toujours pas la date officielle, il parait que c’est en octobre…si tu sais quelque chose de plus précis, dis-le moi !!
    Je pense que je lirai d’autres titres d’Eléna Ferrante après sa saga !

    • sandrion dit :

      Merci pour ton commentaire qui m’a permis de me rendre compte que je n’étais pas claire ! C’est Olga qui a 38 ans, quittée par son mari pour une jeunette de 20. Le sujet est archi banal mais franchement, c’est raconté de manière nerveuse, sans concessions et crue.

  3. aifelle dit :

    Pour l’instant, j’ai le tome 1 de sa quadrilogie dans ma PAL ; j’attends que le tapage fait autour d’elle retombe un peu pour l’entamer.

  4. Touloulou dit :

    « c’était moi-même que j’éliminais », c’est très beau et tellement juste. Je le lirai si ma lecture de l’amie prodigieuse qui m’attend est concluante !

  5. maggie dit :

    Je ne sais pas pourquoi mais je ne suis toujours pas tentée par les romans de cette auteure.

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